Le billet de mars 2015


A ce jour, les Conseils Généraux sont composés de 88% d'hommes et de 12% de femmes (source : Wikipedia).
Cette main mise du sexe masculin sur le monde politique n'est évidemment pas acceptable à une époque où l'exigence d'égalité Femmes/Hommes est très forte. Imaginerait-on expliquer aujourd'hui ce déséquilibre en disant que la politique est le domaine naturel des hommes, que les électeurs - et les partis politiques - font moins confiances aux femmes, que les femmes elles-mêmes se mettent en retrait ? Non bien-sûr, et un tel langage serait immédiatement condamné. Bien plus, nos parlementaires ont modifié le Code Électoral pour, par une mesure on ne plus volontariste, promouvoir l'égalité Femmes/Hommes. C'est ainsi que, dès dimanche prochain, nous voterons pour des binômes à l'élection des Conseillers Départementaux.

A ce jour, la résidence des enfants de parents séparés est fixée à 77% chez la mère, à 12% chez le père et à 17% en alternance (voir le site du Ministère de la Justice).
Ce déséquilibre choque-t-il nos élus ? Nos élus pensent-ils à l'impact de cette situation sur les fonctions sociales que peuvent exercer les femmes et les hommes concernés ? Pensent-ils à l'effet déterminant sur la représentation du rôle de l'homme et de la femme qui est ainsi inculquée aux enfants ? Non, beaucoup de nos parlementaires ne pensent pas à cela et ont trouvé l'explication : les hommes ne demandent pas la garde des enfants. Ici, point n'est besoin de mesures volontaristes. Et on ferme délibérément les yeux sur le fait que, quand un père demande la Résidence Alternée pour ses enfants et que la mère s'y oppose, la résidence est fixée chez la mère dans 75% des cas(1).
Oui mais, dira-t-on, le parallèle entre les élections politiques et les séparations parentales est fallacieux parce que, pour ces dernières, intervient l'Intérêt de l'Enfant. Comme si ne confier un enfant que marginalement à son père était constitutif de son intérêt (précisons : en période scolaire, puisque les pratiques judiciaires actuelles consacrent presque toujours l'égalité parentale pendant les vacances !). Intérêt de l'Enfant que nos parlementaires se gardent bien de définir dans le Code Civil, préférant laisser les juges l'apprécier... avec des résultats qu'il faudrait avoir l'honnêteté de regarder en face.

Treize ans après la loi sur l'Autorité Parentale de 2002, deux ans après les cris d'alerte des "pères perchés" (voir les entrées correspondantes dans notre rubrique Actualités), il est grand temps de faire le constat et d'en tirer les conséquences : il faut empêcher les juges de s'opposer à la résidence alternée quand ils n'ont pas motif sérieux et avéré ; il faut encourager - et non décourager - les hommes à rester présents et impliqués dans la vie de leurs enfants. Il en va non seulement de l'égalité concrète Femmes/Hommes, mais aussi et surtout du message que nous voulons transmettre à nos enfants, les citoyens - électeurs, élus - de demain.

C'est ce qu'a bien compris l'Assemblée de Corse dans une remarquable motion de février 2015. Cette motion enjoint les décisions judiciaires de respecter la "notion d'égalité parentale maintes fois réaffirmée dans les textes internes et internationaux". Pour cela, elle demande au Gouvernement que "la résidence en alternance, dans la mesure où l'un des parents la demande et sous réserve que l'intérêt supérieur de l'enfant soit préservé, ne puisse être refusée, à l'instar de l'Autorité Parentale devenue Conjointe de droit, que pour des raisons graves dûment motivées par le juge". Elle demande au Gouvernement "que soit mieux affirmé dans le code civil (...) les principes de la coparentalité et de l'égalité père/mère".

Ce que nous voulons, ce n'est pas une loi APIE en trompe l'oeil, où on accorde la résidence à tout le monde sans rien faire pour inciter les juges à un partage du temps équilibré. Un peu de volontarisme en faveur de l'égalité parentale de la part de nos élus, voilà ce que nous attendons d'eux.

Philippe Etienne, correspondant SOS PAPA Finistère
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(1) : Les motifs de refus invoqués par les juges ne sont l'insuffisance des capacités éducatives d'un des deux parents que dans 0,7% des cas, l'éloignement des deux foyers que dans 2,4% des cas, l'indisponibilté d'un des deux parents que dans 3,5% des cas, pour des raisons matérielles que dans 3,5% des cas, etc. En revanche, "l'intérêt de l'enfant" arrive en première position avec 30,6% des cas.